Le procès pour crimes contre l’humanité de l’ex-Première dame de Côte d’Ivoire Simone Gbagbo a repris lundi avec la participation de ses avocats, après une semaine de suspension. L'accusée était quant à elle absente. Le président de la Cour d’assises d’Abidjan, le juge Boiqui Kouadjo, a renvoyé le procès au mardi 29 novembre 2016 avec possibilité d’établir un calendrier pour le passage à la barre des témoins cités par la Défense.
Après des explications sur ce qui a pu conduire à la suspension du procès, les deux camps et même le président de la Cour d’assises se sont réjouis du retour de la défense à la Cour. Et cela, après une médiation du bâtonnier de l’Ordre des avocats.
Le procès a été renvoyé au mardi avec la présence de Simone Gbagbo, et aussi de la mise sur pied d’un calendrier permettant aux témoins cités par la défense de comparaître à la barre.
C’est bien à ce niveau que se situe le désaccord entre les deux parties. En effet, après les témoins de l’accusation, les avocats de la défense ont demandé à la Cour la comparution d’un certain nombre de personnalités du pays dont l’actuel président de l’Assemblée nationale et ancien chef de la rébellion Guillaume Soro, l’ancien Premier ministre Jeannot Kouadio Ahoussou ou l’ex-ministre Charles Koffi Diby. A ceux-là s’ajoutent l’ancien chef de l’armée ivoirienne, Philippe Mangou, ambassadeur au Gabon, et l'ex-patron de la gendarmerie, le général Kassaraté Tiapé, ambassadeur au Sénégal.
La Cour avait répondu que cette requête était nulle et qu’elle passait outre la comparution de ces personnalités. Ce qui a donc conduit Mme Gbagbo et ses avocats à suspendre leur participation au procès.
Aujourd’hui, la question semble être résolue avec une probabilité que ces personnalités soient à la barre pour donner leur part de vérité sur la crise postélectorale de 2011. Mais cela n’est pas chose aisée. Car, fait savoir le procureur général, on ne peut pas faire comparaître une personnalité à la barre comme un citoyen ordinaire. C’est tout un processus qu’il faut respecter.
« (…) Pour ceux qu’ils exigent à comparaître comme témoins, il leur est demandé de formuler leurs demandes à l’audience. Et si la loi permet de les satisfaire, elles seront satisfaites, mais si la loi ne le permet pas, elles ne pourront pas être satisfaites», a-t-il indiqué, soulignant quand même que le code prévoit des dispositions pour le témoignage d’un certain nombre de personnalités: les présidents d’institutions, les ministres, etc.
«Ce qu’il veut dire que la demande doit être présentée en conseil des ministres, et une fois que le Conseil donne son accord, le président de la République l’acte avec un décret pour que le principal concerné puisse comparaître », a-t-il précisé.
De son côté Me Rodrigue Dadje, avocat de Simone Gbagbo, soutient le contraire. Pour lui, il suffit tout simplement de faire respecter la loi.
«Non, la procédure pour faire comparaître un ministre n’est pas trop longue. Elle peut se faire en une journée avec un courrier adressé au concerné ou au gouvernement qui donne son accord pour sa comparution et la rédaction d’un décret ne prend pas du temps. Si donc nous sommes revenus, c’est grâce à la médiation du bâtonnier et considérons que, plus aucune citation n’a été annulée. Ceux dont la Cour avait décidé de passer outre, elle n’en passe plus outre ces derniers. Nous avons donc la possibilité de citer tous les acteurs des faits sans exception…», a expliqué Me Rodrigue Dadje, annonçant le retour de sa cliente à l’audience, parce qu’il a reçu l’assurance que les droits de la Défense seront garanties.
Pour rappel, le président de la Cour d’assises d’Abidjan, le juge Boiqui Kouadjo, avait décidé le 16 novembre que le procès de l’ex-première dame se poursuivrait sans elle et avec des avocats commis d’office. Suite donc au refus de celle-ci et de ses avocats de venir au procès.
Depuis le 31 mai 2016, Mme Gbagbo est jugée pour son implication présumée dans des tirs d’obus sur le marché d’Abobo, et pour sa participation à une cellule de crise qui planifiait et organisait des attaques menées par des milices et des membres des forces armées proches de l’ancien régime, lors de la crise postélectorale de 2011, qui a fait plus de 3.000 morts.
Auteur: Daniel Coulibaly
