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Lutte contre le tabagisme/ Dr Koffi Nestor : « (…) les femmes qui fument le tabac tombent moins enceintes, ou accouchent des enfants morts nés »

Dans cet entretien, Dr Koffi Nestor, médecin en santé publique au Programme National de Lutte contre le Tabagisme (PNLTA), nous parle des méfaits du tabac sur l’environnement, les fumeurs et même des non-fumeurs.

Quelle est la prévalence de la consommation du tabagisme en Côte d’Ivoire ?

En Côte d’Ivoire, la prévalence de la consommation du tabagisme est autour de 15%. Cela sous-entend que 15 personnes sur 100, fument le tabac. Mais, cette prévalence est plus alarmante au niveau de la tranche d’âge des jeunes (13-17 ans) qui avoisine souvent 20% et celle de la tranche d’âge (35-39 ans) qui tourne autour de 40%.

Nous remarquons que de nombreux fumeurs vouent un culte au mégot de la cigarette. Que pensez-vous d’une telle attitude ?

Cette situation est une mauvaise habitude. En dehors des conséquences de fumer, se passer les mégots vous expose des infections telles que l’hépatite virale, la tubercule, le sida et bien d’autres. En outre, les mégots de la cigarette jetés par terre sont très dangereux pour l’environnement. Un mégot de cigarette jeté par le fumeur pollue 500 litres d’eau. Si on tient compte du nombre de fumeurs dans le District d’Abidjan, qui en moyenne fument près d’un paquet de cigarettes par jour, cela voudrait dire que la nappe phréatique de la forêt du banco est menacée. Car, si un mégot pollue 500 litres d’eau, si on tient compte du nombre de mégots en une seule journée, cala doit nous interpeller. Donc, les fumeurs doivent comprendre que non seulement ils se détruisent eux-mêmes, mais, en fumant, ils détruisent l’environnement dans lequel ils se trouvent qui est important pour la vie de tout le monde.

Quelle est l’impact de la fumée de la cigarette sur l’environnement et des individus ?

L’individu qui s’adonne au tabac ou qui est assis à côté d’un fumeur, expose sa santé aux méfaits du tabagisme donc les conséquences sont les organes les plus atteints notamment les poumons, le cœur, les vaisseaux, le cerveau et tout le reste du corps. 90% des cancers de poumon sont dûs au tabac et 25 à 30% des autres cancers, le tabac est un élément déclencheur. Quant aux femmes qui fument le tabac, elles tombent moins enceintes, si elles tombent enceintes ce sont des enfants malades qui naissent, ou, elles accouchent des enfants morts nés. Des pays tels que le Zimbabwé et le Cuba qui ont le tabac comme matière première, abattent de gros arbres pour faire la culture. Cet abattage engendre la disparition du couvert végétal à impact directement le climat qui désorganise les sites bio zochimiques, de l’eau, de l’azote, de l’oxygène, hydrogène. La culture du tabac nécessite l’utilisation des engrais insecticides qui sont très toxiques, et avec le phénomène des précipitations des pluies, ces produits seront levés et vont toucher la nappe phréatique. Cette culture du tabac est un désastre pour l’environnement. Un autre élément est la fumée de cigarette qui se projette dans l’atmosphère. Cette fumée est très toxique parce qu’elle est riche en élément nuisible. C’est pour dire le tabac à des conséquences sanitaires, sociales, économiques, écologiques, environnementales. C’est en cela nous disons que le tabac pose un problème de développement durable car ces conséquences sont transversales.

Des observateurs estiment que fumer la chichia est moins nocif que les différents types de cigarettes. Quel est votre avis sur la question?

C’est faux. Bien vrai que le tabac est toxique sur toutes ces formes, mais, avec la structure de la chichia, vous avez une partie intra descente et une partie ou il y a de l’eau. S’agissant de la chichia, la fumée qui est aspirée et inhalée par le fumeur est d’abord chaude et passe par la partie qui contient de l’eau qui l’a refroidie et ce qui fait que l’inhalation est plus profonde. Ce qui signifie, qu’elle va atteindre plus les tissus puisque la fumée n’est plus chaude. Donc, en termes de conséquences, elle est très désastreuse.

De plus en plus, la chichia prend de l’ampleur chez la jeunesse dans notre pays. Selon vous, doit-on craindre pour la santé de tous ces jeunes ?

La chichia est un nouveau type de tabac, elle est plus dangereuse en ce sens qu’une bouffée de chichia est l’équivalent de 4 à 5 cartouches de cigarettes. Par conséquent, les jeunes qui s’adonnent à la chichia s’exposent de façon accélérer aux conséquences désastreuses du tabagisme.

Existe-t-il des moyens légaux de répression des fumeurs ? Si oui, que dit la loi ?

La Côte d’Ivoire a pris à bras le corps ce problème de tabagisme qui est un fléau mondial. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a mis en place un traité international pour régler ce problème de tabagisme qui est dit : ‘’convention cadre de l’OMS pour la lutte anti-tabac’’. La Côte d’Ivoire qui l’a ratifié a mis en œuvre cette convention par l’adoption d’un décret interdisant de fumer dans les transports en commun dans les lieux publics en 2012. Ensuite en 2019, la Côte d’Ivoire vient de prendre une loi anti tabac. Cela pour dire à la population qu’il y a problème en la demeure, et que le problème de tabagisme doit être pris de façon sérieuse. Au niveau de la répression, comme la loi l’indique, cette interdiction n’est pas une auto censure, nous disons que si vous voulez fumer, vous ne devez pas enfumer l’autre, vous ne devez pas exposer la santé de l’autre. Aujourd’hui, depuis la prise du décret 2012-2013, nous avons fait de la sensibilisation à travers les moyens de communication qui existent pour sensibiliser la population, surtout la jeunesse, quant à l’utilité de changer de comportement face au tabagisme dans les espaces publiques. Cela a été fait, aujourd’hui, le programme est dans la phase de la répression, vous ne serez pas étonné de voir les forces de l’ordre ramasser les chichas dans les restaurants, les agents de la santé, de la police sanitaire et de la police nationale donner des contraventions aux réfractaires qui continueront de fumer dans les espaces publiques. La loi est là et elle leur donne la force de travailler dans ce sens.

Concernant le volet sensibilisation, existent-ils des actions concrètes pour prévenir l’addiction ?

La Côte d’Ivoire se bat dans la lutte contre le tabagisme et se base sur la convention cadre de l’Oms pour la lutte anti-tabac qui a été ratifiée par la quasi-totalité des pays du monde. Dans cette convention, la sensibilisation occupe une grande place parce qu’en fait, il y a un programme qui a été établi par cette convention en six points. Surveiller la consommation du tabac, faire des enquêtes pour avoir les prévalences et les données pour orienter la campagne. Il faut protéger la population contre la fumée de tabac. C’est dans cette optique que les décrets portant interdiction de fumer dans les lieux publics ont été pris. Il faut donner et offrir une lucarne à celles ou ceux qui désirent arrêter de fumer. C’est en se sens que des médecins ont été formés dans les services santés scolaires et universitaires, des Districts pour le sevrage du tabagisme. Il existe des centres de santé et des structures pour le sevrage. Il faut montrer les méfaits de la cigarette aux fumeurs, interdire la publicité du tabagisme sur toutes ces formes, augmenter les taxes sur les produits du tabac. Montrer les méfaits fait partie de la sensibilisation, expliquer et sensibiliser la frange jeune sur les manipulations de l’industrie du tabac. Notamment la présentation de la baguette de cigarette, la forme, le lite, le parfum bien choisi sont des pièges. Nous communiquons et informons les non-fumeurs d’éviter de tomber dans ce fléau.

Quels sont les conseils appropriés aux fumeurs et non fumeurs ?

A l’endroit des fumeurs, nous leur disons qu’il n’est jamais tard d’arrêter de fumer quel que soit leur degré de dépendance, quel que soit le temps de dépendance, quelque soit la quantité de cigarettes fumée, on peut et on gagne toujours à arrêter de fumer. En arrêtant, ils seront en bonne santé.

Un mari qui fume, n’apprécie pas bien la cuisine de son épouse parce qu’en fumant, il brule les parties gustatives à tel enseigne qu’il ne sent pas le goût de la nourriture. Dès que vous allez arrêter de fumer, vous allez prendre du poids et vous allez bien manger. Et, en faisant du sport, vous retrouverez votre forme. Nous invitons les jeunes non-fumeurs à ne pas céder à la tentation et ne pas se laisser manipuler par le marketing de l’industrie de tabac. La moitié de ces jeunes qui fument, vont mourir de différents pathologies.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Auteur: I Khalil

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