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Entretien / S.E.M. WU JIE, l'Ambassadeur de Chine en Côte d'Ivoire: « La Chine est le plus grand pays en développement » Featured

S.E.M. WU JIE, l'Ambassadeur de Chine en Côte d'Ivoire a présenté le bilan du Forum sur la Coopération sino-africaine (FOCAC) lors d'un entretien avec La Diplomatique d'Abidjan (LDA). 

 

Actuellement, le monde traverse des changements inédits depuis un siècle, en tant que pays du Sud Global, comment la Chine et les pays africains confrontent ensemble les défis majeurs ?

La Chine est le plus grand pays en développement alors que l’Afrique est le continent regroupant le plus grand nombre de pays en développement. Les deux parties sont les forces importantes du Sud Global. Dans le contexte des changements inédits depuis un siècle et dans un monde subi des mutations et des bouleversements, je pense que la Chine et l’Afrique doivent plus que jamais renforcer leur solidarité et leur coopération :

Premièrement, transmettre l’amitié traditionnelle forgée dans les luttes anti-impérialistes, anticoloniales et anti-hégémonistes et promouvoir l’équité et la justice internationales. Deuxièmement, continuer à défendre un partenariat gagnant-gagnant et prôner une mondialisation économique inclusive et bénéfique pour tous. Troisièmement, construire activement une communauté d’avenir partagé Chine-Afrique de tout temps à l’ère nouvelle et promouvoir le développement de la modernisation au bénéfice des peuples chinois et africain.

La Chine est disposée à rester fidèles aux principes de «sincérité, résultats effectifs, amitié et bonne foi» et de recherche du plus grand bien et des intérêts partagés, à adhérer à l’esprit de coopération amicale sino-africaine et à renforcer la coopération de tous azimuts avec les pays africains dans le cadre de diverses mécanismes dont le Forum sur la Coopération sino-africaine, pour déclencher un nouvel élan de la modernisation du Sud Global et dessiner un nouveau chapitre de la construction de la communauté d’avenir partagé pour l’humanité.

Comment la Chine s’assure-t-elle de tenir ses engagements pris lors du Sommet du Forum sur la Coopération sino-africaine ?

Le Forum sur la Coopération sino-africaine (FOCAC) est né au début du siècle, devenant la première plateforme de dialogue institutionnel établie par la Chine et les pays en développement, et le premier mécanisme de coopération multilatérale entre la Chine et un continent entier. Au cours des 24 années écoulées depuis son lancement, le FOCAC a organisé quatre sommets, neuf réunions ministérielles et 17 réunions de hauts fonctionnaires. Il est devenu une plate-forme importante pour le dialogue collectif entre la Chine et les pays africains, un mécanisme efficace pour approfondir la coopération pragmatique et un symbole distinctif de la coopération Sud-Sud. Après des consultations, la Chine et l’Afrique ont établi et perfectionné les mécanismes de suivi pour la bonne mise en œuvre des résultats du Forum. Je voudrais en dire quelques mots : Premièrement, la Conférence ministérielle, qui se tient tous les trois ans, réunit les Ministres des Affaires étrangères et les Ministres chargés de la coopération économique internationale, examine et formule les initiatives majeures liées au Forum. Deuxièmement, la Réunion des hauts fonctionnaires, une réunion préparatoire aux réunions ministérielles et aux sommets, qui se tient généralement un an et quelques jours avant la réunion ministérielle. Les 18e et 19e Réunions de hauts fonctionnaires se tiendront respectivement en 2026 et en 2027. Troisièmement, la Conférence entre le corps diplomatique africain et le Comité de Suivi chinois du FOCAC, qui se tient au moins deux réunions chaque année pour faire un point sur la mise en œuvre du FOCAC. Conformément au principe de la rotation géographique équitable au sein de l’Union africaine, à partir de la 11e Conférence ministérielle de 2030, le mandat de la coprésidence africaine sera réduit de six à trois ans. La République du Congo assurera la prochaine coprésidence africaine du FOCAC de 2024 à 2027 et la République de Guinée équatoriale, de 2027 à 2030. Les engagements de la Chine envers l’Afrique sont solennels. La Chine est disposée à travailler avec l’Afrique pour tirer davantage des mécanismes du Forum ci-dessus dans la promotion de la mise en œuvre des résultats du Forum comme prévu, au bénéfice des peuples chinois et africain.

Les dix Actions de partenariats sur la modernisation annoncées au Sommet reflètent le changement de la politique de l’Afrique de la Chine, notamment en matière d’investissement et de financement. La Chine accordera désormais plus d’attention à la coopération dans le domaine d’interconnextion, de projets de bien-être social Petits et Beaux, d’énergie, de santé, etc. Est-ce que cela signifie que la Chine prête de moins en moins d’attention aux infrastructures dont l’Afrique a un besoin énorme ?

La construction des infrastructures a toujours été un domaine traditionnel pilier de la coopération entre la Chine et l’Afrique. Depuis longtemps, la Chine a participé à la construction d’un grand nombre de projets d’infrastructures en Afrique à travers des aides non remboursables et des investissements commerciaux. La « vitesse chinoise » et la « qualité chinoise » ont été témoins du développement rapide des routes, des ponts, des ports et d’autres infrastructures en Afrique, contribuant de manière significative à la modernisation des pays africains. L’économie mondiale de notre époque présente de nouvelles caractéristiques et tendances, les énergies renouvelables, l’économie numérique et l’intelligence artificielle sont les nouveaux dynamismes et moteurs de croissance pour le développement économique dans l’avenir. Dans ce contexte, la coopération économique et commerciale sino-africaine devrait s’adapter à ces tendances de développement. Le Plan d’Action de Beijing a déclaré que la Chine et l’Afrique travailleront, dans le cadre de l’Initiative « Ceinture et Route » et selon le principe du marché, à ce que les entreprises chinoises participent à la coopération en matière de routes, de chemins de fer et de logistique. Les deux parties encouragent la transition verte dans les transports et encouragent les entreprises chinoises à participer à l’installation d’infrastructures pour soutenir la transition verte dotée d’une technologie de pointe chinoise renommée. Les Dix Actions de Partenariat sino-africaines couvrent dix domaines, englobant à la fois les domaines traditionnels comme les infrastructures et les domaines émergents tels que la transformation verte et numérique, avec des mesures concrètes et des objectifs quantitatifs. Par exemple, dans le domaine de la connectivité, la Chine, la Tanzanie et la Zambie ont signé, pendant le Sommet, un protocole d’accord pour « activer » le chemin de fer Tanzanie-Zambie, afin de créer un réseau de connectivité sino-africain avec des liaisons terrestres et maritimes et un développement coordonné. Dans le domaine du développement durable, la Chine est prête à mettre en œuvre 30 projets d’énergie propre en Afrique et à cocréer 30 laboratoires conjoints. Le monde évolue, ce qui donnera inévitablement de nouvelles caractéristiques à la coopération sino-africaine. Cependant, la volonté de la Chine d’aider les pays africains à parvenir à un développement économique et social de haute qualité, et le caractère mutuellement bénéfique de la coopération sino-africaine, resteront toujours les mêmes. Tant que les pays africains en ont besoin, qu’il s’agisse d’infrastructures ou de domaines émergents, la Chine est prête à fournir son aide dans les limites de ses capacités.

 

Le Président chinois XI Jinping a annoncé un financement de 30 mille milliards de FCFA en faveur de l’Afrique sur les 3 prochaines années. Ces financements vont-ils aggraver encore la dette des pays africains ? Peut-on avoir une idée de ce qui est réservé à la Côte d’Ivoire et les domaines d’activité concernés par ce financement ?

Depuis sa création il y a 24 ans, le FOCAC a joué un rôle important dans la promotion du développement de l’Afrique et l’amélioration des conditions de vie de ses populations. La Chine a aidé l’Afrique à construire et à moderniser près de 100 000 kilomètres de routes, plus de 10 000 kilomètres de voies ferrées, près de 1 000 ponts et près de 100 ports. Au cours des trois dernières années, les entreprises chinoises ont créé plus de 1,1 million d’emplois en Afrique. Tout cela a apporté un soutien énergique à l’Afrique pour surmonter le goulot d’étranglement du développement. En fait, la Chine n’a jamais été un créancier majeur de l’Afrique. Selon les données de la Banque mondiale, les créanciers multilatéraux et privés représentent 80% de la dette souveraine étrangère de l’Afrique, alors que la dette bilatérale n’en représente qu’une minorité. Malgré cela, la Chine, en tant que plus grand contributeur à l’initiative de suspension du service de la dette du G20, a toujours activement aidé l’Afrique à alléger les pressions de remboursement de sa dette par le biais de canaux bilatéraux et multilatéraux. Dans le Plan d’action adopté lors du Sommet du FOCAC, la Chine a également proposé des mesures spécifiques d’allègement de la dette. Comme l’a souligné le Ministre chinois des Affaires étrangères WANG Yi, la coopération internationale avec l’Afrique doit être juste, équitable et pragmatique. Nous appelons la communauté internationale, en particulier les pays développés et les institutions financières internationales, à assumer leurs responsabilités et à aider les pays africains à alléger le fardeau de leur dette et à parvenir à un développement durable.

Quelles sont les résolutions qui ont été prises par la Chine pour soutenir les actions de lutte contre le réchauffement climatique en Afrique ?

L’Afrique est l’une des régions les plus touchées et les plus vulnérables au changement climatique. A cet égard, la Chine valorise pleinement ses avantages pour apporter à l’Afrique son soutien toujours énergique par des actions pragmatiques. Prenons l’exemple de la Côte d’Ivoire. Ces dernières années, nos deux pays ont obtenu des résultats fructueux en la matière. De multiples projets de production d’énergie propre, tels que les barrages hydroélectriques de Soubré et de Gribo-Popoli, sont mis en service ou en construction par les entreprises chinoises, qui permettent non seulement de consolider la position de la Côte d’Ivoire en tant qu’exportateur régional d’énergie, mais aussi de renforcer la capacité de la région d’Afrique de l’Ouest en matière de développement vert. De plus en plus de véhicules chinois à nouvelles énergies sont entrés sur le marché ivoirien depuis l’année dernière, offrant une nouvelle expérience de conduite très appréciée par la population. Dans le cadre de l’Action de partenariat pour le développement vert, la Chine travaillera avec les pays africains à mettre en œuvre la Déclaration sur la coopération sino-africaine de lutte contre le changement climatique, par le renforcement des capacités d’adaptation au changement climatique, le soutien des technologies et produits des nouvelles énergies, et la réalisation de plus de projets d’énergies propres, pour les accompagner à lutter contre le changement climatique afin d’ouvrir un avenir plus radieux à la coopération sino-africaine.

 

La Chine est devenue un partenaire stratégique pour l’Afrique. Comment la Chine envisage-t-elle de renforcer sa coopération avec la Côte d’Ivoire dans les secteurs clés tels que les infrastructures, l’agriculture, la technologie, l’éducation et le transfert de compétences ?

Ces dernières années, la Chine s’efforce de mener une coordination entre l’Initiative pour le Développement mondiale, le Plan d’action du Forum sur la Coopération sino-africaine et le Plan National de Développement 2021-2025 de Côte d’Ivoire à travers des actions tangibles. Pendant le Sommet de Beijing du FOCAC, le Président Xi Jinping a annoncé dix Actions de partenariat sur la modernisation que la Chine entreprendrait avec l’Afrique, ce qui lance des propositions sur la coopération sino-ivoirienne dans le domaine d’infrastructure, d’agriculture, de technologie, d’éducation, etc.. Dans le domaine d’infrastructure, parmi les projets mis en service figurent le Stade Olympique d’Ebimpé, le Pont Alassane Ouattara, l’autoroute Tiébissou-Bouaké, le barrage de Soubré, etc., tandis que les travaux de la voie de contournement d’Abidjan Y4, le barrage de Gribo-Popoli, le projet d’alimentation en eau potable des 12 villes, l’échangeur du Carrefour Akwaba, etc. avancent à pas assurés. Je suis convaincu que, dans le cadre de l’Initiative « Ceinture et Route » et de l’Action de partenariat pour l’interconnexion, la coopération sino-ivoirienne dans le domaine des infrastructures donnera des résultats encore plus encourageants. Dans le domaine d’agriculture, le projet hydroagricole pour le riz de Guiguidou soutenu par la partie chinoise a duré depuis presque 30 ans, qui a réussi à épauler la partie ivoirienne dans la formation d’un grand nombre de talents de la culture de riz et a fait augmenter significativement les revenus de paysans locaux. Investies par des entreprises chinoises, des usines de traitement de l’hévéa ont créé des postes d’emploi locaux et ont fait accroître la capacité de transformation nationale dans ce secteur. Nous constatons un bon avancement de la construction de la plus grande usine de transformation du cacao en Côte d’Ivoire par une entreprise chinoise, dont l’achèvement renforcera les capacités d’autonomie et de contrôle de la Côte d’Ivoire dans le secteur du cacao. La partie chinoise est disposée à continuer la coopération bilatérale agro-industrielle, commerciale et technologique avec la partie ivoirienne, encourage en même temps l’investissement et l’opération des entreprises chinoises et ivoiriennes dans les deux sens et veillera à ce que la valeur ajoutée des industries reste en Côte d’Ivoire. Dans le domaine de technologie, des entreprises de technologie de pointe, y compris des entreprises dans le secteur de la télécommunication, entrent davantage dans le marché ivoirien. D’une part, elles apportent une contribution à la formation des techniciens ivoiriens, d’autre part elles jouent un rôle important dans l’informatisation de la Côte d’Ivoire. La Chine est prête à travailler ensemble avec la Côte d’Ivoire à explorer activement des opportunités de coopération dans les domaines de nouvelle énergie et d’économie numérique afin d’augmenter sa capacité du développement vert et de l’accompagner à la transition numérique. Dans le domaine d’éducation et de compétence, l’atelier LUBAN construit conjointement par l’INP-HB et la partie chinoise a formé plus de 700 étudiants. Sept nouveaux lycées techniques et un deuxième atelier LUBAN destiné à l’agriculture sont en construction. La partie chinoise continuera d’approfondir la coopération éducative et de formation avec la partie ivoirienne et d’accompagner la Côte d’Ivoire à transformer ses ressources démographiques en avantages de talents afin de renforcer son autonomie de développement.

Vu que la Côte d’Ivoire est riche en ressources minérales, quel bénéfice la coopération Chine-Côte d’Ivoire dans le domaine d’industrie minière apporte-t-elle au peuple ivoirien?

La coopération minière entre la Chine et la Côte d’Ivoire constitue un domaine important de coopération mutuellement bénéfique, présentant un énorme potentiel et de belles perspectives de développement. Au niveau national, la coopération sino-ivoirienne aidera la Côte d’Ivoire à mieux transformer ses avantages en matière de ressources en avantages de développement. La Côte d’Ivoire pourra non seulement obtenir des financements nécessaires au développement national, mais plus important encore, acquérir de l’expérience et des technologies afin de construire sa propre chaîne de valeur industrielle minière et de s’intégrer à la chaîne d’approvisionnement mondiale. Au niveau social, sachant que les ressources minérales de la Côte d’Ivoire sont largement réparties dans des régions relativement moins développées, l’arrivée des entreprises chinoises contribueront à l’augmentation des recettes fiscales et à la création des emplois locaux, améliorant le bien-être de la population et favorisant un développement plus équilibré du pays.

Entretien réalisé par mc

Auteur:
LDA Journaliste

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