Père fondateur du Syndicat de l’Education Préscolaire de Côte d’Ivoire (SEPCI), Gouessé Diomandé laisse désormais la place à une nouvelle génération après 14 années passées à la tête dudit syndicat. Homme de challenge et de conviction, avec un esprit combatif à nul autre pareil, l’ex-numéro un du SEPCI, qui juge le bilan de ses mandats plus que positif, s’annonce sous d’autres cieux. Le syndicaliste aguerrit entend en effet créer très prochainement un mouvement politique de la droite libérale. Ainsi, après avoir passé plus d’une décennie au plus haut niveau du milieu syndical, l’homme annonce son comeback dans l’arène politique, qu’il a déjà côtoyé dans le passé. Entretien.
“ Or moi, je travaille au résultat. Je suis pour la Gestion Axée sur les Résultats (GAR). On se donne des objectifs collectifs et connus de tous. On se donne le temps et les moyens pour les atteindre. On s’engage tous dans le travail sans tricherie ni roublardise. Une fois que les objectifs sont atteints, on passe à autre chose.’’
Bonjour M. Gouessé Diomandé, nous sommes ici ce matin pour nous entretenir avec vous ! Mais avant de commencer, pouvez-vous vous présenter brièvement à nos lecteurs ?
Je suis M.Gouessé Diomande. Je suis Educateur Préscolaire. J’exerce au Ministère de la Femme de la Famille et de l’Enfant.
Il y a de cela six mois, vous étiez le leader d’un mouvement syndical, dénommé le Syndicat de l’Education Préscolaire de Côte d’Ivoire (SEPCI). Aujourd’hui, vous avez passé la main après votre congrès ordinaire qui s’est tenu le 19 février 2022. Pouvez-vous nous en dire plus sur le SEPCI ?
Effectivement j’étais le Secrétaire General National du Syndicat de l’Education Préscolaire de Côte d’Ivoire (SEPCI). Après mon dernier mandat, j’ai organisé le troisième congrès ordinaire le 19 février 2022 et le camarade Koffi Kacou Clément a été élu à l’unanimité de tous les délégués de section présents. Je voudrai d’ailleurs profiter de cette interview pour remercier Madame Nasseneba Touré, Ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfant (MFFE) pour le soutien qu’elle nous a apporté dans l’organisation de ce congrès. Je voudrai surtout la remercier pour son esprit d’ouverture et sa franche collaboration avec les organisations syndicales de son Ministère. Je voudrai aussi remercier Madame Yapo Akora Arahamata, la Directrice du service de coordination des structures éducatives de base du MFFE pour avoir initié au sein dudit Ministère un « dialogue social directe » avec les Syndicats. Son action a apaisé le front social au sein du MFFE. Je n’oublie pas le Secrétaire General de la Centrale Humaniste, M. Soro Mamadou qui m’a toujours soutenu dans la gestion de mon syndicat et m’a formé à être un leader syndical juste et objectif. Je n’oublie pas le camarade Abonga Jean Yves Koutouan, Président de l’Inter Syndicale des Fonctionnaires de Côte d’Ivoire (IFCI) dont je suis l’un des collaborateurs, qui m’a encouragé à toujours œuvrer pour l’unité d’action syndicale.
Combien d’année avez-vous passé à la tête de ce syndicat ?
Je voudrai d’abord préciser que je suis le père fondateur du SEPCI. J’ai mis ce syndicat sur pied en novembre 2008. A l’origine, le syndicat se dénommait le MOTRASSEF-CI (Mouvement des Travailleurs Sociaux du Secteur Education Formation de Côte d’Ivoire). Il comprenait trois emplois : les Educateurs Préscolaires et Adjoints, les Maitres d’Education Spécialisée (MESP) et les Maitresses Adjointes d’Education Permanente (MAEP). C’est au deuxième congrès ordinaire en 2016, que nous avons renommé le syndicat après que nous nous sommes séparés des MESP et des MAEP. C’est donc moi qui ai créé le SEPCI. J’ai fait 14 ans à la tête du syndicat, soit de novembre 2008 à février 2022.
Pourquoi une telle longévité à la tête du syndicat ? Vos textes ne limitaient-ils pas les mandats ?
Si, les premiers textes du MOTRASSEF-CI limitaient les mandats du Secrétaire General National à deux mandats de 3 ans chacun. En 2010, on n’a pas organisé de congrès, du fait de la situation socio politique du pays. Quand la situation s’est normalisée, on devait organiser le deuxième congrès ordinaire en 2013. Mais, nous avons tenu une Assemblée Générale Ordinaire la même année qui a donné quitus au Bureau National de continuer le mandat puisque nous étions en train de préparer des négociations capitales avec le Ministère de la Fonction Publique sur des points de revendications importants pour l’Education Préscolaire. Finalement, c’est en 2016 que nous avons tenu le deuxième congrès ordinaire. Et à ce congrès, non seulement j’ai été réélu par mes camarades, mais j’ai aussi reçu, par les nouveaux textes, un mandat de 4 ans reconductible. La limitation de mandat ayant été abrogée par nos textes.
“ On n’obtient rien dans la barbarie et le désordre. Il faut surtout éviter les erreurs de 2017. On n’est pas en guerre contre l’Etat. Donc ils doivent regarder la chose avec sérénité et surtout penser aux intérêts du grand nombre. Les querelles de leadership ne produisent rien de bon. Seule l’unité d’action paye.’’
Cela veut dire que vous pouviez rester longtemps encore à la tête du SEPCI ! Pourquoi avez-vous pris votre retraite du SEPCI cette année ?
Oui effectivement, je n’avais plus de limitation de mandat. Et comme j’ai toujours la confiance de mes camarades Educateurs Préscolaires, je pouvais encore rester à la tête du SEPCI. Mais, j’ai préféré partir parce que les objectifs que mes camarades m’avaient assignés, à moi et à mon équipe de direction, nous les avons tous atteints en 2022. Or moi, je travaille au résultat. Je suis pour la Gestion Axée sur les Résultats (GAR). On se donne des objectifs collectifs et connus de tous. On se donne le temps et les moyens pour les atteindre. On s’engage tous dans le travail sans tricherie ni roublardise. Une fois que les objectifs sont atteints, on passe à autre chose.
Quel bilan faites-vous donc de votre gestion du SEPCI durant ces 14 années de mandat ?
Durant c’est 14 années, la lutte n’a pas été de tout repos. Surtout de 2008 à 2015. On faisait au moins une grève chaque année. Mais, c’est à partir de 2015 que nos revendications ont commencé à connaitre un début de résolution. Ainsi, avons-nous obtenu au plan administratif, l’achèvement de notre profil de carrière. Aujourd’hui, un Educateur Préscolaire n’est plus bloqué au grade B3. Il peut aller de l’Emploi d’Educateur Préscolaire Adjoint de grade C3 à celui d’Inspecteur de grade A7. Nous avons aussi obtenu de nouveaux concours professionnels et concours professionnels exceptionnels. À ce sujet j’aimerai remercier Madame la Ministre de la Fonction Publique, Madame Anne Désirée Ouloto qui a été très réceptive à nos doléances. Au niveau du Ministère de la Femme de la Famille et de l’Enfant, nous avons aussi réussi à transformer le service de coordination qui a en charge les établissements préscolaires de son ministère en une Direction, et ce grâce à Madame la Ministre Nasseneba Touré. Au niveau financier, l’obtention des SDA est une réussite commune dont chaque syndicat qui a œuvré à son aboutissement doit être fier.
Est-ce qu’on peut affirmer que vous êtes satisfait de ce bilan et dans quelle mesure ?
Oui, je suis satisfait de ce bilan. Parce que nous venons de loin. Nous avons un emploi qui est essentiel dans le développement d’un pays émergent comme le nôtre. Mais qui ne fait pas parti des priorités de l’Etat. C’est une erreur qu’il faut corriger. Avec les questions d’autonomisation financière de la Femme ; l’apparition de familles monoparentales et des familles recomposées, la question de la garde des enfants sera tôt ou tard, une problématique à adresser dans notre pays. Or, pour le moment, dans notre pays, ce sont les Educateurs Préscolaires qui sont outillés à assurer l’Education et la Protection de la Petite Enfance. Mais, il y a de nouveaux chantiers à défricher.
Lesquels ?
Au niveau de l’Education Préscolaire, il y a la réforme de l’Institut National de Formation Sociale (INFS) qu’il faut absolument faire. Il faut que cet établissement ait la possibilité de recruter des docteurs comme à l’INFAS et à l’ENS. Des enseignants chercheurs qui vont revaloriser la formation dans tous les cycles de formation. C’est vraiment capital. Et au niveau de l’Etat, il y a une nouvelle trêve sociale qu’on demande au travailleur. Mais, ce n’est pas une trêve qu’il faut demander, puisque les travailleurs ne sont plus en conflit avec l’Etat depuis 2017.
A votre avis, qu’est que l’Etat doit négocier avec les travailleurs, si le terme de « trêve social » ne convient pas ?
L’état doit négocier une convention collective avec les syndicats en adoptant une approche Co-déterministe, comme cela se fait au Canada ou en Allemagne. C’est comme cela que l’accord qui sortira de ces négociations sera inclusif et pourra satisfaire toutes les parties.
Vous quittez le Syndicat de l’Education Préscolaire de Côte d’Ivoire, doit-on vous attendre sous d’autres cieux ?
Je ne quitte pas totalement le SEPCI. Puisque j’ai été élu, au congrès de février, président du Bureau du Conseil Syndical (BCS). Donc je suis toujours au service de mon syndicat. Mais, j’ai décidé de retourner à mes premiers amours. Je vais faire de la politique. Des amis et moi avons décidé de mettre sur pied un mouvement politique qui se réclame de la droite libérale.
Pourquoi n’entrez-vous pas dans un parti existant et vouloir créer un mouvement politique ? N’est-ce pas une organisation politique de trop ?
Non. Il y a toujours de la place en politique pour de nouvelles idées. Car la politique, c’est d’abord et avant tout le champ d’expression des idées.
Le mouvement politique que vous comptez créer est-ce un parti politique ? Et Peut-on avoir l’exclusivité du nom de ce mouvement politique ?
Je ne peux rien dire pour le moment. Mais vous devez savoir que notre organisation se veut proche des idées politiques d’un ancien chef de l’Etat ivoirien. Nous vous communiquerons les détails dans la conférence de presse de lancement qui aura lieu très bientôt.
“ Le coût de la vie est trop élevé dans notre pays. Or, nos salaires ont des modes de calcul qui datent des années 1960.Vous comprenez que ce n’est pas juste. C’est d’ailleurs pour cela qu’on dit qu’en Côte d’Ivoire, l’Etat est riche mais le peuple est pauvre. C’est un paradoxe qu’il faut corriger.’’
Mais en attendant votre entrée en politique, quel message avez-vous à passer à vos successeurs et vos camardes syndicalistes ?
A l’endroit de mon successeur, le camarade Koffi Kacou Clément je lui souhaite bonne chance à la tête du syndicat. Il a un mandat de cinq ans pour adresser les nouvelles revendications spécifiques de l’Education Préscolaire qui sont encore nombreuses. A mes camarades syndicalistes, surtout aux responsables syndicaux des enseignants, je leur demande beaucoup de lucidité et de tempérance dans les négociations qui sont en cours avec le gouvernement. Les travailleurs, surtout nous les fonctionnaires, avons beaucoup à y gagner. On n’obtient rien dans la barbarie et le désordre. Il faut surtout éviter les erreurs de 2017. On n’est pas en guerre contre l’Etat. Donc ils doivent regarder la chose avec sérénité et surtout penser aux intérêts du grand nombre. Les querelles de leadership ne produisent rien de bon. Seule l’unité d’action paye.
Votre mot de fin ?
J’espère simplement que le gouvernement entendra la voix des syndicats lors du dialogue social qui s’annonce. Le coût de la vie est trop élevé dans notre pays. Or, nos salaires ont des modes de calcul qui datent des années 1960.Vous comprenez que ce n’est pas juste. C’est d’ailleurs pour cela qu’on dit qu’en Côte d’Ivoire, l’Etat est riche mais le peuple est pauvre. C’est un paradoxe qu’il faut corriger.
Interview réalisée par Georges Kouamé
Auteur: LDA Journaliste