Dans cette interview accordée à LDA, elle parle de la condition de vie de la femme en Côte d’Ivoire d’une part. Et d’autres parts, de son engagement auprès de cette couche vulnérable de la société.
LDA: Pouvez-vous présenter le CEFCI ?
J.K: Le Cefci, Centre féminin pour la démocratie, des droits humains en Côte d’Ivoire est une ong de promotion des droits humains. Spécifiquement ceux de la femme. Elle a été crée en janvier 2003 par Mme Nathalie TRAORE. Et sa mission consiste à faire en sorte que les femmes et les hommes aient les mêmes droits. Après la crise de 2002, la première présidente, alors activiste des droits humains et plusieurs autres femmes ont constaté les différentes violations faites aux femmes. Et le cefci s’est donné pour objectif de défendre le droit de ces femmes. Plus tard, nous avons étendu notre champ d’action à la démocratie, l’éducation, les droits de l’homme, la gouvernance.
LDA: Vous avez évoqué le droit de la femme. Alors, quelle est la situation actuelle de la femme en Côte d’Ivoire. Est-elle reluisante ?
J.K: Il y a eu beaucoup d’efforts. Des progrès ont été faits. Mais, beaucoup reste à faire également. Nous avons très peu de femmes qui participent aujourd’hui à la vie politique du pays. Alors que nous savons combien de fois les femmes sont actives dans les partis politiques en Côte d’Ivoire. Malheureusement, quand nous observons la nomenclature de plusieurs partis politiques, il y a un effectif peu reluisant de femmes aux postes clés. En plus de cela, notre gouvernement actuel compte 7 femmes sur 36 postes ministériels soit moins de 20%. Ces chiffres sont loin de faire honneur à la Côte d’Ivoire qui a ratifié tous les instruments internationaux en faveur des droits de la femme. Je veux parler de la CECEF qui est la Convention des Nations Unies sur l’Elimination de toutes formes de Discrimination à l’égard des femmes. Ainsi que du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatifs aux droits des femmes en Afrique, appelé Protocole de Maputo. Mais l’espoir est permis. Depuis quelques semaines, un Projet de loi favorisant la représentation de la femme dans les assemblées élues a été proposé à l’Assemblée Nationale, et nous l’espérons, sera voté par les députés.
LDA: Donc, beaucoup reste à faire ?
J.K: Nous pensons qu’il y a beaucoup à faire. Il y a la problématique de l’éducation de la femme. Même si aujourd’hui bon nombre de parents ont compris que la petite fille autant que le petit garçon doit être mis à l’école, nous nous rendons compte que le maintien de la petite fille dans le cursus scolaire pose encore problème. Les femmes participent pleinement à la vie politique de leur pays, en exerçant le contrôle citoyen de l’action publique, en occupant des postes clés dans les partis, et en occupant des postes électifs. Autre chose, la pauvreté a un visage féminin. Malgré tout ce que les femmes font sur le terrain, les richesses sont très mal reparties. Ce qui fait que les femmes sont les plus pauvres.
LDA: Alors, pensez-vous que l’Etat de Côte d’Ivoire fait des efforts dans ce sens. Si oui à quel niveau ?
J.K: L’Etat fait des efforts. Et on ne peut pas le nier. Quand on voit une loi sur le quota des femmes aux assemblées élues qui est sur le point de naitre, nous sommes conscients que sans volonté politique, nous ne pourrions pas avoir cette avancée. Il en est de même de la loi sur l’école obligatoire qui existe en Côte d’Ivoire. Mais, l’Etat doit aller plus loin. Rapprocher l’école des populations, Faire en sorte que les hôpitaux soient équipés, lutter contre la corruption à tous les niveaux.
LDA: Je suis tenté de vous demander, quelle est votre contribution dans tout cela. Comment accompagnez-vous l’Etat ?
J.K: Nous faisons beaucoup de sensibilisation dans plusieurs parties du pays. Notamment dans le nord de la Cote d’Ivoire pour le maintien de la jeune fille à l’école. A ce jour, Plus de 400 kits de toilettes ont été distribués à des jeunes filles afin de leur permettre de se concentrer sur leurs études et les encourager à aller plus loin. Le cefci s’est engagé de sélectionner certaines filles selon des critères. A savoir leurs potentiels et leur milieu. Nous avons produit le « cahier de la femme candidate » qui est un manuel, pour permettre aux femmes de mieux se préparer aux échéances électorales. Nous promouvons des activités génératrices de revenus pour les femmes en milieu rural.
LDA: Pensez-vous que vous êtes écouté ?
J.K: Nous sommes écoutés. Même si nous n’avons pas les résultats immédiatement. Nous avons de petites, mais aussi de grandes victoires.
LDA: Depuis un moment, on constate que vous multipliez les voyages hors du pays. Pouvez-vous nous en dire plus ?
J.K: Depuis Décembre 2014, le cefci a été élu comme membre de l’ECOSOCC de l’Union Africaine lors de sa 2nde assemblée générale. L’ECOSOCC, c’est le conseil économique et social de l’Union Africaine. Depuis le mois de juin, Nous avons été élus présidente du cluster genre de la 3ème AG. La mise en œuvre du plan d’action nous a encore conduit à un déplacement au Caire, le mois dernier. A travers l’Ecosocc nous faire des études et des propositions concrètes sur l’avancée de notre continent.
LDA: Parlez-nous donc de votre plan d’action
J.K: Nous avons élaboré au niveau de l’Ecosoc et du cluster genre, un plan d’action qui se décline en plusieurs composantes dont le recensement de toutes les études qui ont été diligentées par les départements de l’Union Africaine sur la femme et l’égalité femme homme, la participation à la commission sur le statut des femmes au niveau des Nations Unies qui va se tenir en mars 2020, la promotion de la politique de la culture intelligente. Le CSA (Climate Smart Agriculture), l’état des lieux des législations familiales dans les pays d’Afrique et leur impact sur l’accès des femmes, à leur droit, et enfin, une activité en relation avec le thème de l’année prochaine : Faites taire les armes. Nous avons bon espoir que tout cela pourra contribuer à l’évolution des droits des femmes en Afrique.
LDA: Un mot à l’endroit des décideurs
J.K: La question de la femme ne doit pas s’arrêter au niveau des discours. C’est une question que nous devons prendre à bras le corps. Nous devons faire en sorte que les femmes et les hommes aient les mêmes droits. Nous invitons l’Etat de Côte d’Ivoire à promouvoir plus de femmes aux postes de décisions. Les compétentes féminines existent : 7 femmes ministres sur 36, c’est trop peu. Que le président de la République, qui est le 1er défenseur des droits des femmes donne l’exemple ; dans le prochain gouvernement, nous voulons 50% de femmes. Ce ne sont pas les compétences qui manquent. Il suffit juste de la volonté. Plus les femmes seront dans des postes de décision, que cela soit dans toutes les composantes de la vie publique en Côte d’Ivoire, nous auront ces femmes qui pourront adresser la question du genre. J’invite également mes sœurs ivoiriennes à faire en sorte que la réussite ne soit pas seulement masculine. Parce que, quand elles vont réussir, elles tireront les autres filles. Pour le projet de parrainage des jeunes filles que nous lançons bientôt dans le nord du pays et à l’est. Nous avons besoin de femmes qui pourront se sentir concernées par cela. et pourront apporter leur contribution et se montrer en model pour ces jeunes filles. Cela va leur permettre d’être en confiance. Nous avons beaucoup de projets et très peu de moyens, nous invitons le peuple ivoirien à nous soutenir matériellement et financièrement.
Je vous remercie.
Interview realisée par Mohamed Compaoré
Auteur: LDA Journaliste