Côte d’Ivoire–Énergie : un Pacte national pour électrifier le pays et s’imposer dans la transition énergétique africaine

La Côte d’Ivoire veut franchir un nouveau cap. Avec l’adoption en 2025 du Pacte national de l’énergie, le pays se donne l’ambition d’assurer l’accès universel à l’électricité et de réussir sa transition vers un mix énergétique plus propre. Une équation complexe, mais stratégique pour consolider sa position de leader régional

Déjà premier exportateur d’électricité en Afrique de l’Ouest, avec une capacité installée de 2 907 MW en 2023, Abidjan entend devenir un véritable hub énergétique du continent. Cette ambition s’inscrit dans le cadre de l’initiative « Mission 300 » de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement, qui vise à connecter 300 millions d’Africains d’ici 2030.
Des objectifs à la hauteur des ambitions

Le pacte trace une feuille de route ambitieuse

La Côte d’Ivoire vise 100 % d’accès à l’électricité d’ici 2030, contre 64 % aujourd’hui. Sa capacité installée devrait grimper à 5 128 MW et ses exportations doubler grâce à un maillage régional renforcé. Autre tournant : la part des énergies renouvelables devra passer de 31 % à 45 % du mix énergétique, un objectif en phase avec les engagements climatiques pris au titre de l’Accord de Paris.
Ces cibles ne sont pas qu’un vœu pieux. Elles reposent sur la réhabilitation des réseaux, l’ouverture au secteur privé, le développement de mini-réseaux solaires et un recours accru aux financements internationaux, évalués à deux milliards de dollars d’ici 2030.

Un système encore fragile

Mais la route reste semée d’embûches. Le gaz naturel, qui fournit près de trois quarts de l’électricité nationale, rend le pays dépendant des fluctuations des marchés internationaux et limite ses performances climatiques. Les pannes massives enregistrées en 2024 et des pertes techniques évaluées à 20 % rappellent la fragilité d’un réseau sous pression.
L’hydroélectricité, qui a longtemps servi de vitrine aux énergies renouvelables ivoiriennes, est menacée par la variabilité climatique. Et sur un autre front, celui de la cuisson propre, plus de 2,4 millions de ménages attendent toujours des solutions alternatives, alors que le biogaz ou le butane peinent à se déployer.

La bataille régionale de l’énergie

La Côte d’Ivoire n’avance pas seule. Le Ghana multiplie ses investissements solaires et mise sur l’intégration du gaz offshore, le Sénégal s’apprête à exploiter ses champs gaziers et à renforcer son rôle dans le West African Power Pool (WAPP), tandis que le Maroc, hors zone WAPP, s’impose déjà comme un champion continental des renouvelables avec ses gigantesques complexes solaires et éoliens.
Dans cette compétition énergétique, Abidjan joue la carte de la stabilité politique et d’un savoir-faire reconnu en matière d’exportation d’électricité. Son rôle moteur dans le WAPP et les investissements de groupes comme Eni sur des projets durables renforcent cette position. Mais la Côte d’Ivoire sait qu’elle doit accélérer pour ne pas perdre son avance face à des voisins désormais très offensifs.

En perspective

Si ses ambitions se traduisent en réalisations, la Côte d’Ivoire pourrait, d’ici 2035, afficher un taux de couverture proche de 99 %, soutenir une croissance économique annuelle de 7 à 8 % et se poser en modèle africain de transition énergétique. Mais la réussite dépendra de la capacité à conjuguer financements, innovations et gouvernance. À défaut, le Pacte national de l’énergie risque de rester une promesse ambitieuse parmi d’autres.

 

Par Bakary Cissé

 

Auteur:
LDA Journaliste

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