Le Premier ministre, François Bayrou, a prononcé sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale, le mardi 14 janvier 2025. Pour ce grand oral d'1 heure 30 mn, le chef du gouvernement a insisté sur l'importance de la dette de la France, du vote du budget 2025, ainsi que sur le caractère essentiel de la réforme des retraites. M. Bayrou a toutefois annoncé remettre ce dernier projet « en chantier, avec les partenaires sociaux ». L'enjeu est d'éviter la censure.
« La situation de ce gouvernement présente un avantage considérable », a déclaré le centriste en introduction de son discours de politique générale. « Quand tout va mal, on est contraint au courage. (...) Il y a un deuxième atout décisif. C'est le besoin, l'exigence, l'injonction que le pays nous assigne : retrouver la stabilité ! », a declaré François Bayrou.
Le chef du gouvernement a insisté, dans les premières minutes de son intervention, sur l'importance de lutter contre l'endettement de la France. « Tous les partis de gouvernement, sans exception, ont une responsabilité dans la situation (d'endettement) créée ces dernières décennies. » Cette dette « est une épée de Damoclès au-dessus de notre pays et de notre modèle social », estime-t-il, accusant « tous les partis d'opposition » de demander « sans cesse des dépenses supplémentaires », ce qui produit un « tango fatal qui nous a conduits au bord du précipice ». A 3 228 milliards d'euros, l'endettement de la France n'a jamais été aussi élevé. Il représente 112 % du PIB, au lieu des 60 % maximum(Lemonde.fr).
Une remise « en chantier » de la réforme des retraites
Parmi les questions centrales de ce discours : la réforme des retraites, voulue par Emmanuel Macron et adoptée en 2023 au forceps, grâce à l'article controversé 49.3 de la Constitution, qui portait de 62 à 64 ans l'âge légal de départ. Le Parti socialiste en demandait la suspension le temps de la renégocier.
Le Premier ministre a assuré que son gouvernement va remettre « en chantier » l'impopulaire réforme, « avec les partenaires sociaux, pour un temps bref, et dans des conditions transparentes ». Il n'y aura « aucun tabou, pas même l'âge » de départ en retraite, fixé à 64 ans lors de la réforme, projet phare du président Emmanuel Macron. Un âge qui avait provoqué un fort mécontentement populaire.
« Adopter sans tarder les deux budgets de l'État et de la Sécurité sociale »
François Bayrou a aussi appelé à une adoption « sans tarder » des deux budgets de l'État et de la Sécurité sociale, tombés avec la censure le 4 décembre du gouvernement Barnier. « Cette précarité budgétaire, nous la payons tous au prix fort, entreprises, investisseurs, familles, contribuables, emprunteurs », a deploré le Premier ministre, sans manquer d’inviter les forces politiques à mettre en place les conditions de la stabilité qui impose de se réconcilier, ce dont le pays a tant besoin et que ses citoyens ne cessent de réclamer.
Au-delà de la réforme des retraites, le chef du gouvernement a indiqué qu'il entend réviser à la hausse l'objectif de déficit public du pays à 5,4% du PIB en 2025, contre environ 5% pour le gouvernement de son prédécesseur. « Le gouvernement a donc décidé de revoir sa prévision de croissance pour 2025, elle était de 1,1% avant la censure (du précédent gouvernement, NDLR), nous la fixons à 0,9%, conformément aux prévisions de la Banque de France. Il sera proposé de fixer l'objectif de déficit public pour 2025 à 5,4% du PIB », a-t-il dit.
Et de relancer l'idée d'une « banque de la démocratie » pour que « le financement des partis politiques et des campagnes ne dépende plus de choix de banques privées, mais puisse éventuellement, et en recours, être le fait d'organismes publics placés sous le contrôle du Parlement ». « L'argent ne doit pas diriger les consciences et l'argent ne doit pas prendre le pas sur la libre volonté des citoyens », a-t-il fait valoir dans sa déclaration.
Le chef du gouvernement a proposé d'avancer « sur la réforme du mode de scrutin législatif », avec « un principe de proportionnelle », soulignant qu'il devra « être enraciné dans les territoires. Cette réforme, « probablement », « nous obligera à reposer en même temps la question de l'exercice simultané d'une responsabilité locale et nationale », a-t-il rajouté, suscitant la protestation de nombreux députés à gauche, plus de dix ans après la suppression du cumul des mandats lors de la présidence de François Hollande.
La réforme de l'audiovisuel public « devra être conduite à son terme »
Concernant la réforme de l'audiovisuel public, elle « devra être conduite à son terme », a jugé François Bayrou. Une proposition de loi portée par la ministre de la Culture, Rachida Dati, prévoyant la création d'un holding, France Médias, composée de quatre filiales, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde ainsi que l'Institut national de l'audiovisuel, aurait dû être examinée en décembre, avant la chute du gouvernement de Michel Barnier.
François Bayrou a évoqué une « promesse française », concernant les problématiques sociales et en particulier les rapports hommes-femmes.
Le Premier ministre souhaite « reprendre l'étude des cahiers de doléances » rédigés à l'issue des débats qui avaient suivi les manifestations des « gilets jaunes », un mouvement « négligé » selon lui. Les « gilets jaunes » ont « dénoncé l'état qu'ils ressentaient de notre société », « la division du pays entre ceux qui comptent et ceux qui ne comptent pas », mais « la promesse française suppose que nous puissions abattre le mur qui existe entre les uns et les autres », a-t-il dit.
En ce qui concerne l'Éducation nationale, l'orientation précoce « est une erreur » et Parcoursup « est une question », a déclaré François Bayrou, en estimant nécessaire d'« ouvrir les portes » et de favoriser « les réorientations, les changements de formation ».
Reprise du processus politique en Nouvelle-Calédonie et immigration à Mayotte
En outre, François Bayrou a annoncé qu'il inviterait en janvier « les forces politiques » de Nouvelle-Calédonie à ouvrir des négociations à Paris « qui devront aboutir à la fin de ce trimestre ». L'adoption par l'Assemblée nationale d'une réforme très controversée du corps électoral calédonien avait déclenché des émeutes massives en mai, qui « ont plongé ce territoire dans un profond marasme », a rappelé le Premier ministre, souhaitant la reprise du « processus politique » sous la houlette du ministre des Outre-mer Manuel Valls.
Charge contre les normes environnementales
Le Premier ministre a mené une charge contre les contrôles et les normes environnementales auxquels les agriculteurs sont soumis, allant jusqu'à qualifier de « faute » les inspections « avec une arme » de l'Office français de la biodiversité. « Je m'engage (...) à ce que nous remettions en question les pyramides de normes en donnant l'initiative aux usagers. Ceux que l'on contrôle doivent avoir leur mot à dire sur les contrôles », a-t-il promis.
Source RFI
Auteur: LDA Journaliste