Santé publique : la rage tue plus de 500 personnes par an en Côte d’Ivoire

La rage fait partie des maladies tropicales négligées qui cause en moyenne 59 000 décès humains chaque année dans le monde. Les populations pauvres et vulnérables sont les plus touchées. En Côte d’Ivoire, la rage a été identifiée comme l’une des zoonoses prioritaires majeures. L’élimination à l’horizon 2030 constitue un défi énorme à relever. Le Direction des services vétérinaires du ministère des Ressources animales et halieutiques donne quelques éléments de recherches effectués pour la lutte contre cette maladie.

La rage est un grave problème de santé publique dans plus de 150 pays et territoires, principalement en Asie et en Afrique. Il s’agit d’une maladie tropicale virale, zoonotique et négligée qui entraîne des dizaines de milliers de décès chaque année, dont 50 % parmi les enfants de moins de 15 ans. Les morsures et les griffures de chien, sont à l’origine de 99 % des cas de rage humaine. En Côte d’Ivoire, parmi les 500 personnes qui meurent chaque année, 60% sont issus des zones rurales ou la maladie est méconnue au sein des populations. Les populations rurales sont aussi les plus exposées à cette problématique de santé du fait également de l’ignorance de la prise en charge sanitaire de leurs animaux domestiques en l’occurrence la vaccination des chiens. La rage est donc une zoonose majeure ce qui emmène l’OMS a déclaré qu’une personne décède de rage toutes les neuf minutes dans le monde.

Les facteurs risques indiquent qu’en zone rural la plupart du temps, le chien n’est pas vraiment intégré dans la famille et est obligé de chercher lui-même son repas d’où la divagation constatée de ceux-ci autour des tas d’ordures et des poubelles, lieux par excellences de prolifération du virus. En Côte d’Ivoire, le contrôle de la rage est rendu difficile par de faibles taux de rapportage pour les animaux enragés et la faible couverture vaccinale des animaux domestiques. Le taux de décès dans les communautés marginalisées qui n’ont pas accès aux bons soins de santé est également élevé.

Zéro cas de rage humaine en 2030

Pour lutter contre la rage, un objectif mondial de zéro cas de rage humaine à l’horizon 2030 a été adopté par tous les pays membres de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et de l’Organisation Mondiale de la Santé Animale (OMSA). Par ailleurs, une étude a démontré que les personnes plus susceptibles de mourir de la rage sont les enfants ( âgés de 5 à 14 ans) qui sont les victimes les plus fréquentes en raison de leur taille qui les expose aux morsures.

Dans le cadre de l’atteinte zéro rage en 2030, la Côte d’Ivoire a initié des actions pour élaborer son plan de lutte intégrée contre la maladie. Le Dr KALLO Vessaly, responsable de la Direction du Service Vétérinaires (DSV) au ministère de Ressources Animales et Halieutiques (Mirah) a donné plus de détails, lors d’un échange sur les méthodes de lutte contre ce virus en Côte d’Ivoire.

500 décès par an en Côte d’Ivoire.

Le pays sur l’échelle d’évaluation de la lutte contre la rage en Afrique de l’ouest, se place à 2.4 sur une échelle de 5, soit un taux de 50% de réalisation et se positionne à la première place dans la sous-région, grâce à une collaboration multisectorielle. Le projet Rage-GAVI financé par le partenaire éponyme GAVI (Alliance pour le vaccin) en 2018 a vu la production de 11 articles commis par des scientifiques dans une approche multisectorielle. Cette recherche a permis de faire l’état des lieux de la rage, de connaitre la population canine et enfin la face cachée de la rage en Côte d’Ivoire. « Officiellement il y a une vingtaine de personnes qui meurent de la rage en Côte d’Ivoire, cette recherche nous a permis d’en ressortir près de 500 personnes. Donc, dans cette politique si on n’a pas toutes les évidences, en matière de recherche, on ne peut pas faire une bonne prise en charge. Les chiffres officiels nous donnaient 100 000 chiens en Côte d’ivoire, alors que la recherche dans 8000 ménages, donc 4000 en milieu urbain et 4000 en milieu rural a permis de savoir qu’il faut vacciner 1000 000 de chiens. Sinon on aura vacciné seulement 10% de chiens en Côte d’Ivoire. », confie Dr KALLO.

48 0000 personnes mordues chaque année

La couverture vaccinale de la population canine se situe aujourd’hui a seulement 12% dans laquelle on retrouve juste 5% de taux pour les chiens ruraux c’est-à-dire les chiens du village. L’étude anthropologique quant à elle ressort que 60% des propriétaires de chiens ne connaissent pas la rage. Pour le responsable de la DSV, il faut augmenter le nombre de vaccins contre la rage afin d’éviter les pénuries, afin d’une prise en charge optimisée des mordues.

« Officiellement, c’est 14 000 personnes qui partent à l’INHP suite à une morsure de chien. Après enquête, on s’est rendu compte qu’on a un taux de morsure de 2/1000, c’est-à-dire sur 1000 personnes dans les ménages, il y a 2 qui sont mordues chaque année par les chiens. Quand on le ramène à la population, c’est 48 000 personnes qui sont mordues chaque année au lieu de 14 000, donc il y a plus de 30000 qui ne vont pas à l’hôpital. Quand on veut commander les vaccins, se sont 48 000 doses qui doivent être disponibles. », explique-t-il.

Plus de 70% de la vaccination des chiens peut mener à l’élimination de la rage

Dans plus de 150 pays où la rage canine demeure un grave problème de santé publique, les stocks de vaccins antirabiques humains dans les systèmes de santé publique sont souvent extrêmement limités, en particulier dans les communautés marginalisées. Lorsque le vaccin antirabique humain est disponible dans des établissements privés, le coût de la PE (Post exposition) peut représenter un fardeau financier énorme pour les familles et les communautés. La vaccination des chiens est le moyen le plus rentable et le seul pour éliminer la rage. Pour cela, il faut vacciner au moins 70 % de chiens. », précise Dr KALLO.

Investir dans la lutte contre la rage, un gain financier non négligeable

La rage coûte au contribuable ivoirien 19 milliards FCFA l’année. Lutter contre la rage est donc un investissement à explorer. « Investir dans la rage est rentable tant au niveau de la santé publique qu’au niveau économique », a soutenu le Directeur du Service Vétérinaires (DSV) du Mirah.

« La Côte d’Ivoire gagnerait à y investir pour diminuer à l’avenir le coût de la prise en charge. Des études ont prouvé qu’en y mettant un budget de 2 milliards par an sur 10 ans, on aura éliminé cette maladie dans le pays. Or actuellement, et ce depuis plusieurs années déjà la Côte d’Ivoire perd 19 milliards dans la lutte contre cette zoonose, en un calcul simple, en y investissant, on économise 16 milliards par an. C’est un gain financier non négligeable », ajoute-t-il.

La recherche scientifique avec une approche multisectorielle est ainsi importante dans la lutte contre la rage. La meilleure stratégie est aujourd’hui de vacciner près de 1000 000 de chiens par an. Et également sensibiliser les personnes cibles telles que les femmes, les enfants et les propriétaires de chiens. A ceux-là, il faut ajouter les professionnels des médias( journalistes), blogueurs etc pour plus d’efficacité dans la sensibilisation des populations.

 

 

Auteur: Edithe Valérie Nguekam

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