Quelques jours après la mutinerie qui a secoué la Côte d’Ivoire, le Pr Amoa Urbain connu pour ses prises de positions « solitaires » a, à travers une lettre ouverte au président Alassane Ouattara, demandé la démission de celui-ci. Ces propos très durs n’ont vraiment pas été du goût des partisans de M. Ouattara et les différents partis qui le soutiennent. Pour l’instant la présidence ivoirienne n’a pas encore réagi à cette lettre. Nous vous proposons des parties de cette lettre avec nos commentaires.
«Permettez-moi, d’entrée de jeu, de préciser que la présente lettre ouverte n’a pas pour objet de venir auprès de Votre Excellence pour quémander ou solliciter un poste. Permettez- moi de vous dire que vous semblez avoir atteint le summum de vos performances au sommet de l’Etat et que, par conséquent, l’heure de la démission a sonné : ce serait un acte de courage et de bravoure. Une bonne partie de la population ivoirienne saluerait cette décision par un tonnerre d’applaudissements, cette fois-ci, sans que vous le quémandiez comme vous le fîtes le 1er mai 2017 au Palais présidentiel. Une partie du peuple de Côte d’Ivoire attend de vous une démission, sinon le trésor par vous, amassé en Eburnie, sur cette terre de nos ancêtres qui pleurent sur vous, ne servira que pour votre défense au soir de votre « très brillante et illustre» carrière politique de guerres fratricides aux relents d’«ingouvernabilité», écrit-il au début de sa lettre.
C’est un débat intellectuel qu’il veut engager, dit-il, «.. je voudrais ici engager un débat hautement intellectuel dans un style ainsi choisi et ce n’est pas un jeu d’enfant ».
Le défenseur des Us et coutumes africaines va plus loin dans ses propos, et on se demande s’il est l’auteur de cette lettre, parce qu’il tire à boulets rouges sur le président ivoirien dans tous les sens sans vraiment se retenir, comme si cela était l’expression d’un mal personnel.
« (…) Et c’est aussi vous, vos sponsors et peut-être sûrement une partie de vos adversaires politiques d’alors, qui avez instrumentalisé les jeunes que nous appelons tous honteusement « mutins » ou « microbes » et que vous voulez diaboliser sans remords.[...] c’est donc vous qui, toute votre vie, devez les payer et non l’Etat de Côte d’Ivoire. », accuse le promoteur du Festival international de la route des Reines et des Rois.
«(…)Votre conscience hélas ! déjà si chargée de mille et une lueurs de sang. Dieu fasse que, malgré tout, par démission peut- être (mais quand et comment ?), vous puissiez jouir d’une bonne fin de mandat ! », enfonce-t-il.
Et pire, il pense que M. Ouattara le ferait éliminer physiquement pour ses propos. « Et si mes propos venaient à vous choquer, vous me feriez tuer peut-être, mais peut-être pas ma liberté d’expression ni mes idées qui, déjà, parcourent le monde ; à ma suite, vous en feriez tuer d’autres et vous nous y avez, déjà, si éloquemment habitué mais jamais vous ne pourriez faire tuer toutes les ivoiriennes et tous les ivoiriens qui vous observent et vous regardent dans le silence de la peur, de la terreur et de l‘horreur ».
« Que choisir entre la Grande honte qui vous ferait honteusement partir de la Côte d’Ivoire pour la Haye, peut-être, et une Petite honte qui s’appellerait : «démission» quoique l’une n’empêche pas l’autre?, propose-t-il à M. Ouattara.
Démission ?
En quoi est-ce que la démission de M. Ouattara arrangerait-elle les choses ? Si le Pr Amoa estime que le président ivoirien est à l’origine de plusieurs maux dans le pays, alors qu’il lui donne la latitude de les régler avant de partir en 2020, car c’est celui qui crée les problèmes qui peut en trouver les solutions. Il aurait été encore plus judicieux pour le Pr Amoa de demander à rencontrer le président pour lui faire part de ses inquiétudes et de ses solutions pour la paix sociale et la réconciliation dans le pays que de l’accabler de tous les maux. Il y a donc lieu de s’interroger sur les réelles motivations de cette lettre qui frise une incitation à la révolte.
Et puis une démission de M. Ouattara dans le contexte actuel du pays ouvrirait bien la voie à un désordre et à une instabilité inévitable. Tous ceux qui nourrissent le désir de le voir partir avant la fin de son mandat ou qui veulent lui succéder se livreront à une bataille fratricide. Ce qu’il cherche à éviter en ne démissionnant pas et en trouvant des solutions auxquels fait face le pays.
Et même s’il acceptait de quitter le pouvoir, c’est sûr que les choses seront pires que la situation actuelle du pays.
Auteur: Daniel Coulibaly
